Cette interview est un peu particulière par sa formule, nous avons analysé, dans le cadre d’un travail universitaire, le single Sparks paru sur l’album Azurite, sorti le 21 avril dernier. Malgré les articles de presse, ou pour avoir écouté plus de 30 fois cette chanson … il nous manquait le point de vue de l’artiste, mais il nous fallait surtout la genèse autour de la création de Sparks. C’est par téléphone que nous avons eu cet entretien avec Manon Carvalho Coomans, alias Noa Moon.
Image : © Reflextor
Manon Thomas : Quelles ont été tes sources d’inspiration pour créer la chanson Sparks ? Est-ce aussi grâce à la mer du Nord comme tu l’avais déclaré dans plusieurs interviews?
Noa Moon : « Je ne sais plus où je l’ai composée celle-là…, en tout cas c’en est une des premières. Je crois que je l’ai composée chez moi … Mais, peu importe un petit peu, où j’écris les morceaux, il faut que je sois dans de bonnes conditions, c’est-à-dire : se sentir bien, avoir envie d’écrire ou ressentir quelque chose de bien précis pour pouvoir le retranscrire dans une chanson. Ce que j’expliquais dans les interviews : sur cet album, il y a eu beaucoup d’hésitations, beaucoup de recherches personnelles sur ce que je voulais raconter sur ce que j’avais à dire. Puis, il fallait que je parle de choses qui me parlent parce que, si je ne parle pas de quelque chose qui est lié à mon ressenti, je vais avoir du mal à le défendre sur scène. J’ai besoin d’être sincère et parler de chose que j’ai ressentie tout simplement ».
Prendre le temps pour cet album
« Ces deux ans d’écriture et d’enregistrement d’album ont été deux ans où je me suis posé énormément de questions avec des flottements. Je n’arrivais pas à savoir comment m’écouter. Sparks (NDLR: étincelles) parle de ça, de la capacité à savoir s’écouter. On m’a toujours dit d’écouter ma voix à l’intérieur. On a tous un espèce d’instinct où l’on sait que quand on doit faire quelque chose ou de ne pas le faire. Cette espèce de lutte entre l’ombre et la lumière que l’on peut avoir entre. Il y a des gens qui disent que, dans la vie, on décide de nourrir à côté ou l’autre, je ne pense pas que ce soit si noir et blanc justement. Cette lutte-là est parfois dure à vivre pour certains, et Sparks est vraiment une chanson qui invite à s’écouter. Dans chaque chose négative qui peut arriver dans une vie, on peut en apporter une positive cachée derrière. (…) Il y a tout le temps des choses à traverser ou à gravir et on en est capable. (…) je suis assez fort dans la métaphore ».
Considères-tu Sparks comme une chanson de rock ?
« Je ne sais pas du tout où elle se situe et je ne connais pas les critères « rock », mais je dirai que c’est plus de l’electro-pop et encore il y a un truc un peu « tribal » dans les percussions (…). J’avais envie d’une ambiance un peu plus jingle, plus directe. Il y a énormément de musiques du monde qui sont ultra directes, et où le rythme nous prend directement. Parfois, je trouve que c’est quand il y a le moins d’artistes autour que la musique va directement au coeur, comme dans la musique africaine que j’ai beaucoup écoutée. Parfois, il n’y a pas du tout d’arrangement, mais il y a une manière de faire des sons de la musique du monde, qui ont et un rythme et un son…. presqu’une note dans les percussions. C’est ce que j’ai voulu pour Sparks comme mouvement mélodique et rythmique. C’est parti d’un hasard aussi, car j’ai trouvé une partie rythmique déjà prête dans une banque de son, je n’ai eu qu’à la placer dans mon programme, Sparks a été articulée autour en fait. Par rapport à la démo originale d’ailleurs, il y a beaucoup moins de claviers que dans la version de l’album. Le rythme me permet d’avoir des tableaux des chansons et, en fonction de cela, j’écris le texte sur ce que cela m’inspire ».
On sent que la chanson est une histoire …
« C’est une des rares chansons qui est un peu contée sur l’album comme Night Walk et Kaléidoscope. C’est une progression plus qu’un enchaînement de faits. C’est aussi ma manière d’exprimer les choses en général, mais de façon plus forte ».
Souvent, tu déclares ne pas te considérer comme musicienne, pourtant tu es à la base de la création. Peux-tu nous en dire plus ?
« Disons que je compose sans pour autant gérer des instruments, mise à part la guitare, mais pour le reste c’est un peu de l’expérimentation. Ce n’est pas comme si je prenais mon clavier et que je savais exactement ce que je voulais jouer, ou quel son je recherchais. Un musicien, c’est quelqu’un qui peut recevoir des demandes aussi, pas tous, ce n’est pas une caricature. Sur cet album, j’ai bossé avec un programme informatique dans lequel il y a une bande de sons. Du coup, il y a plein de sons différents. J’ai un clavier MIDI que je branche sur mon ordinateur. Mais, il y avait trop de sons, je ne savais pas quoi choisir. J’ai eu besoin de personnes qui pouvait amener mes compositions à quelque chose de plus musical et de plus précis en fait. En dehors, de la musicalité, il y a tout un côté technique que je ne gère pas. Parfois, je n’arrive à reproduire un son que j’entends sur d’autres disques que j’aime bien. Quels choix à faire aussi ? Quelle sorte d’instruments prendre ? Quel choix de synthés ? etc. Tout cela, je suis assez limitée, mais ce n’est pas un souci parce que, ce que j’aime c’est composer et trouver des mélodies. J’ai plus envie de dire que je suis mélodiste que musicienne et auteur parce que j’écris mes textes ».
Ne pas tout connaître de la musique préserve sa spontanéité artistique
« Je trouve ça génial aussi d’aller, de façon un peu maladroite, d’essayer des sons. Si tu connais trop aussi les sons, il y a des choses parfois moins folles qui peuvent sortir de la musique. Par exemple, quand je découvrais un son de clavier, j’essayais de mélanger avec le son de ma guitare électrique. Peut-être que quelqu’un m’aurait dit, avant, ça va être dégueulasse, ne le fais pas, et enlever le côté spontané. Il y a ce côté innocent qui est chouette aussi de faire de la musique sans tout connaître d’un point de vue technique ».
Tu trouves que ton album n’est pas assez engagé. Que sous-entends-tu par-là ?
« Je crois que c’est un mélange d’engagements artistique et personnel. Je me dis qu’il y a encore tellement d’injustice encore aujourd’hui pour lesquelles on peut se battre. Cela m’a toujours touché, moi, dans la musique. Surtout quand j’ai commencé à écouter de la musique, mais de manière un peu plus consciente quand j’étais adolescente. J’écoutais beaucoup de trucs sur la période Woodstock. Il y avait des idées, des choses à défendre. Je me suis toujours dit que si j’étais née dans ces années-là, ça m’aurait trop fait plaisir d’essayer de véhiculer des messages positifs ou d’essayer de faire bouger des idées. Aujourd’hui, je crois que j’en ai tout à fait les moyens et que je ne fais pas nécessairement. Que ce soit pour plein de causes différentes, car en 2017, il y a encore pas mal de choses à faire et il y a trop d’exemples ». (NDLR : pour rappel, Noa Moon a été la marraine d’Action Damien en 2014 au Congo et a participé aux Francofolies de Kinshasa).
As-tu quelque chose à rajouter ?
« Merci de m’avoir donnée la parole (…) et puis que l’album plaira au plus de monde possible« .
Noa Moon est disponible sur sa page Facebook et retrouvera le public aux Fêtes de la Musique à Bruxelles, le 24 juin, le 22 juillet aux Francofolies de Spa et le 5 août à Ronquières.